Dans cette histoire, le rapport avec la pêche est lointain. Pourtant il y en a un.....
Il faut revenir sur l'article relatif au séjour de pêche en Espagne cette année de 2016, en camping-car. Premier arrêt sur le lac de Méquinenza, en Aragon. Puis, petit séjour sur le lac d'Oréliana, en Estremadura. Et de là, nous décidons, mon ami B... et moi, d'aller voir comment se passe la pêche au Portugal, sur le lac d'Alquevera.
Tout fringant malgré son grand age, mon camping-car avale allègrement les kilomètres.
Mais quand il a commencé à perdre ses freins, j'aurais dû me méfier. Comme un "Dr en mécanico" a soigné ça en moins de deux, c'est le coeur léger que nous continuâmes...J'ai relaté l'incident dans l'article précédent, lors de la description du début de ce voyage, entre Mequinenza et Orelliana.
Sereins, nous sommes sereins ! B... est au volant, et moi, je sommeille bercé par le ronronnement régulier du moteur, lancé à 110 km/h.
Je sursaute : mon oreille pourtant plutôt dure vient de détecter un drôle de chuintement. Regard interrogateur de B... qui se tourne vers moi : "il ne ferait pas un drôle de bruit, ce moteur ?". Le temps de s'interroger et le petit bruit se transforme en un énorme vacarme, mélange d'avalanche de gamelles et de poutrelles métalliques...Heureusement, l'embrayage fonctionne - d'ailleurs il est neuf - et nous arrêtons la bête sur la bande d'arrêt d'urgence.
....qui n'a jamais si bien porté son nom ! Comme l'on dit, le silence qui suivit fut assourdissant. Pas la peine d'être un grand spécialiste de la mécanique pour comprendre que dans la boîte à vitesses ce n'est plus qu'un bloubiboulga de pignons édentés et de roulements sans billes.
Quand ce camping-car est né, le téléphone portable n'existait pas ! C'est pourtant lui qui va me permettre d'appeler les secours. D'abord en France, qui me redirige vers Madrid. Une demi-heure plus tard arrive un camion de dépannage.....trop petit ! Nouvelle attente. Voilà que la police vient aux nouvelles...et nouveau camion.
Drôle de sensation d'être au volant d'un camion qui grimpe sur un autre camion. Un accouplement, en quelque sorte ! Pendant quelques kilomètres je peux admirer le paysage de haut. En me planquant au max, car selon le chauffeur que j'ai en dessous de moi, les flics Espagnols n'aiment pas ça.
C'est l'affaire d'une vingtaine de Kilomètres et nous voilà dans un arrière garage. Coincés derrière un grillage, entre deux ou trois carcasses de vieilles voitures poussiéreuses. Pas engageant ! Le cul du camion sur lequel est posé mon camping-car bascule et, débrayage enfoncé, je me sens reculer . Le tuyau d'échappement racle, s'accroche, mais passe, tant bien que mal. Au point ou nous en sommes, un peu plus, un peu moins.... Explications laborieuses, mais mon "mécanico" est un intuitif : il comprend tout de suite et en moins de deux, il vidange la boîte d'où ne sort qu'un petit verre d'huile ! Qui sent fort la vieille friture ! Pourtant, pas de trace de fuite. Conclusion, le sagouin de mécanicien , "bon français" qui m'a refait l'embrayage, il y a quelques jours n'a pas fait le plein de la boîte... Il a juste laissé de quoi faire suffisamment de kilomètres pour que je ne puisse pas à aller lui expliquer ce que je pense ! Mais ce n'est que partie remise.
Et maintenant ? Nous voilà paumés, dans un arrière garage, entre quelques vieilles caisses poussiéreuses, presque au fond de l'Espagne, dans un bled perdu dans une campagne aride et brûlée : Olivenza. Joli nom, d'accord, mais très loin de centre du monde. Près de Badajoz, Estremadura.
Une chose marche bien : l'assurance. Un coup de fil à une charmante et gentille personne de Madrid, désignée par mon assurance française, et voilà un taxi qui vient nous chercher pour nous amener à un loueur de voitures. Quand on pense à tout le barda qu'il y a dans le camping-car, on choisir un breack. Retour au garage où je me fais donner quelques grands sacs poubelle, où nous entassons toutes nos affaires. Bonjour le rangement ! Tout ça à toute vitesse, comme si nous étions attendu quelque part. Alors que nous venions de plomber une semaine de balade ! Ce qui me vaudra d'oublier le principal du matos de pêche à la mouche - entre autre.
Nous voilà sur l'autoroute.Je conduis, direction plein Nord. Grand silence. Chacun dans ses pensées.... Soudain, B... se prend la tête dans ses mains se met à crier :" Que je suis c..., mais que je suis c....!" Dans ce cas là, je me garde bien de contredire le plaignant ! Des fois qu'il n'aurait pas tord ..." j'ai oublié la clé de ma voiture dans le camping-car ! " Et sa voiture est chez moi, en France, et chez lui , c'est à 100km de là ! Il lui semble bien avoir un double....dans la voiture ! Même pas sûr ! Quelque part, chez lui, il y a un triple qui ouvre les portes mais qui ne démarre pas le véhicule. La seule chose qui ne nous manque pas, c'est le temps pour organiser la récupération de la fausse clé par téléphone. Son fils lui sera d'un grand secours.
Nuit à l'hôtel entre Salamanque et Vittoria et arrivée vers 17h . Pile poil pour récupérer la clé sur le parking d'un restaurant. B... brave la pluie battante et attend dehors, au bord de la route. La clé passe, dans la voiture attendue, mais ne s'arrête pas ! Je vous passe le moment d'agitation ! Car le numéro de portable du gars c'est son fils qui l'a....à 100km de là !
Finalement, la voiture, et donc la clé, nous attend 1 km plus loin. Nous avions fixé le rendez-vous devant " l'Andalou " et ils nous attendaient devant " le Catalan " ! Encore une histoire Espagnole !
Maintenant, reste plus qu'à attendre que mon " mécanico " me trouve une "caja de cambio " de " segunda mano". Je sens que je vais avoir l'occasion d'améliorer mon Espagnol !
Les jours passent.... Pour me faire patienter, mon mécano inspecte l'engin, à la recherche de points sensibles. Et il en trouve ! Un pot d'échappement fendu par ci,
Un boulon qui manque par là
Et une durite de turbo en déliquescence
En attendant de découvrir une nouvelle boîte, je fais réparer. C'est utile et en plus, ça fait passer le temps !
Mon mécanicien trouve trois entreprises susceptibles de faire un échange standard. L'une est éliminée : pas confiance. La seconde est chère et il me conseille la troisième.Comme je n'ai aucune vision de la chose, j'accepte. Pour 1700€, payable d'avance. Quand même ! Ma boîte va à Barcelone pour un lifting. Elle ne fait qu'y passer : destination finale : la Pologne !! Pour refaire une boîte à vitesse dans le sud de l'Espagne, il faut l'envoyer en Pologne ...! Je me suis revu, gamin, un pinceau à la main, en train de nettoyer les pignons étalés sur l'établi de mon père...Lui, il n'avait pas besoin d'aller en Pologne pour réparer une boîte. Surtout une boîte de C25.
Les semaines passent...Je communique régulièrement avec le garage. Merci Google traduction ! C'est approximatif, mais en faisant des phrases simples.... Recherchons désespérément un pignon de 5ième. En Pologne, en Allemagne, en Italie, et même en France ! Les grandes chaleurs passent et enfin, la boîte prend le chemin du retour.
Aussitôt arrivée, aussitôt remontée, aussitôt essayée et....bruit infernal ! aussitôt démontée !
Et ma boîte reprend le chemin de la Pologne...Je commence à douter. La confiance, assez bien établie au début, commence à se fissurer. Mais que faire à 1300km de mon camping-car ? Un ami d'origine espagnole se charge des communications téléphoniques. Attendons...
Et la Pologne jette l'éponge : ils renvoient la boîte à vitesse et les 1700€ ! Je pense que mon mécanicien espagnol a été un excellent négociateur. Je ne sais quel moyen de pression il a utilisé, mais il a été très efficace.
Nous voilà revenus au point de départ. Après cinq mois de galère.
Je lance un SOS sur les ondes à tous mes potes et connaissances de France. Toutes les casses sont fouillées. Sur internet, c'est la surchauffe ! Je trouve des boîtes, mais jamais la bonne. Celle du C25 TD souffre d'une grande faiblesse du côté de la cinquième. Et comme de nombreux propriétaires de cet outil, je cherche....
Finalement trois entreprises me proposent, soit un échange standard, soit une nouvelle boîte rénovée, à condition de fournir ce qu'ils appellent ...un kit de 5ième ! En quelque sorte, le serpent qui se mord la queue ! Heureusement, mon "mecanico" est là. Il m'a trouvé une boîte rénovée provenant d'un autre camping-car cassé. C'est bien connu, le malheur des uns fait souvent le bonheur des autres. Pour le mien, de bonheur, il me faudra aligner autour de 1850€ ! Par ici, en Français, ils ne savent pas trop parler ; mais en euros.....
En plus, elle brille drôlement !
Marchera ? Marchera pas ? C'est le grand stress pendant quelques jours... Finalement, c'est par téléphone que j'ai la réponse : boîte remontée, camion essayé sur route pendant 150km , et 3h sur pont élévateur pour surveiller les fuites potentielles. Et ça marche !!!
Aller le chercher. Ce n'est pas la porte à côté. C'est l'avion et le taxi que mon assurance me propose. Changement à Madrid, arrivée à Lisbonne et traversée du Portugal en voiture. J'ai un ami qui veut bien m'accompagner. Je ne refuse pas...
Après six mois d'attente, c'est avec un grand plaisir que je me lève à 2h30 du matin pour aller prendre l'avion à Toulouse. Bien sûr, nous ne sommes pas en retard : les deux papis sont plantés les premiers devant la porte d'embarquement ! Un grand merci à l'épouse du copain qui n'a pas hésité à sacrifier sa nuit pour prendre le volant et nous amener.
Après deux sauts de puce, nous débarquons à Lisbonne, et c'est la fin de toute anxiété quand je vois mon nom affiché sur un papier à la sortie de l'aéroport : le taxi est bien au rendez-vous. Durant la traversée du Portugal, nous n'aurons pas l'occasion de nous ennuyer. Notre chauffeur sera un vrai guide touristique, il nous racontera sa vie, le tout entrecoupé de chansons d'Aznavour de passage au Portugal. A tue-tête ! Il est 15h30.
Et c'est la rencontre avec celui qui est presque devenu un ami : mon mécanicien Espagnol. Tout fier de me montrer que mon camion fonctionne parfaitement, il me fait voir tout son travail en m'emmenant dans la fosse. Tout est fait. les vidanges, les niveaux.... Je n'ai plus qu'à prendre le volant. J'ai déjà tout payé depuis la France, et il refusera même un "favor" qui, par contre, sera bien accepté par le chauffeur de taxi.
Après un repas au resto du coin, nous prenons la route. Pas de problème pour traverser Badajoz, maintenant, je connais. Tout se passe bien et l'anxiété du départ est vite dissipée. De 3h de l'après-midi à 9h du soir nous avalons pas mal de kilomètres. Il nous faudra une bonne heure de recherche et plusieurs tentatives infructueuses avant de dénicher un petit resto-hôtel. A cause de l'heure tardive,nous aurons quelques difficultés à nous faire servir : l'Espagne n'est plus ce qu'elle était !
Sans chômer sur l'autoroute, nous arriverons chez nous le lendemain vers 17h. La boucle est bouclée.